
Qu’est-ce que l’EMDR ?
EMDR veut dire Eye Movement Desensitization and Reprocessing. En français, cela donne Retraitement et Désensibilisation par les Mouvements Oculaires, on parle également d’intégration neuro-émotionnelle par les mouvements oculaires.
L’EMDR est une thérapie née au Etats-Unis dans les années 80. Sa créatrice, Francine Shapiro découvre, lors d’une promenade dans un parc, que les mouvements oculaires l’aident à atténuer des émotions difficiles. 40 ans plus tard, de nombreuses recherches sont venues confirmer cette intuition et c’est aujourd’hui tout un protocole structuré et enrichi qui met à profit cette découverte pour aider des milliers de personnes à travers le monde.
L’EMDR est à l’origine principalement utilisée pour traiter les Syndromes de Stress Post Traumatique (SSPT) pour lesquels son efficacité est largement reconnue. Mais aujourd’hui, son utilisation s’est élargie et on peut y avoir recours pour soigner des problèmes d’anxiété, des troubles de l’humeur, des addictions, des douleurs, des deuils et bien d’autres difficultés fréquemment rencontrées.
Le système TAI
A la base de l’EMDR, il y a l’hypothèse du TAI : TAI veut dire Traitement adaptatif de l’information. Derrière ce nom barbare se cache une vérité très simple : nous disposons tous, à l’intérieur de nous, d’un système de guérison qui nous aide à surmonter les difficultés émotionnelles. Et il ne s’agit pas là d’une invocation idéaliste, mais d’une vérité neurobiologique.
Pensez à un moment de votre vie où vous avez vécu une émotion difficile ou une frustration du quotidien : un entretien qui s’est mal passé, une altercation avec un voisin ou un inconnu, une chute de votre enfant qui vous a fait très peur. Peut-être avez-vous passé les quelques heures ou les quelques jours d’après à y penser, mais il est très probable qu’aujourd’hui, il ne reste de cet événement qu’un souvenir que vous pouvez raconter sans difficulté, voire en en riant. C’est parce qu’au cours de ces quelques heures et de ces quelques jours qui ont suivi l’événement déplaisant, votre système de guérison a “travaillé” sur ce qui vous était arrivé pour l’intégrer à votre histoire au milieu de tous les autres souvenirs que vous avez.
Quand notre système de guérison est submergé
Mais certains souvenirs, parce que les émotions qu’ils génèrent sont trop fortes, les situations concernées trop graves, trop dangereuses, trop extrêmes, notre système de guérison se trouve dépassé. Il ne parvient pas à traiter le souvenir et à l’intégrer à notre histoire, à ce que l’on appelle nos réseaux adaptatifs. Il existe alors et si l’on simplifie, deux situations :
- Le souvenir est activé en permanence : notre cerveau reste dans le mode d’alerte généré par la situation, incapable de se calmer et de retrouver un sentiment de sécurité. Nous sommes hyperactivés, stressés en permanence, irritables, à fleur de peau, en proie à des flashs, des cauchemars… C’est ce qu’il se passe le plus souvent lorsque nous vivons un événement traumatique en étant adulte.
Exemple : Martine a été témoin d’un accident de voiture il y a deux mois. Elle marchait dans la rue quand la personne qui marchait devant elle a traversé sans regarder. Une voiture l’a percuté et projeté 5 mètres plus loin. Martine sur le moment a été tétanisée et n’a pas pu apporter assistance à l’homme accidenté, inconscient et désarticulé sur le sol. Heureusement, d’autres passants ainsi que le conducteur ont pu le faire et l’homme a pu être transporté à l’hôpital. Mais depuis, rien ne va plus pour Martine. Elle est tendue tout le temps, elle fait des cauchemars où elle voit l’homme inerte par terre. Elle entend le crissement des pneus, le choc de la voiture, voit le sang sur le pare-brise sous forme de flash dans sa journée. Elle est terrifiée à l’idée de traverser la route et s’inquiète pour ses enfants quand ils sortent. Elle souffre également de la culpabilité de n’avoir pas pu porter secours à l’homme. Elle se dit aussi sans cesse qu’à quelque seconde près, ça aurait pu être elle.
On le voit ici, le système de guérison de Martine a été submergé par la violence de la scène et la confrontation à sa propre fragilité.
- Le souvenir est mis de côté : notre cerveau met le souvenir de côté. On ne se souvient pas vraiment de ce qu’il s’est passé, le souvenir résiste à nos tentatives de nous remémorer. Cependant, même si on ne parvient pas à y accéder, ce qui s’est passé nous a affecté et continue de nous affecter. Cela peut se manifester dans notre corps, par des douleurs, des tensions, des problèmes d’humeur, des idées obsessionnelles, mais également des émotions difficile : de la peur, de la tristesse, de la colère de manière inadaptée et incontrôlable surtout si une situation qui ressemble à celle qui nous a fait souffrir vient activer ce souvenir. C’est ce qui arrive plus souvent quand les évènements que nous avons vécu sont plus anciens, notamment dans l’enfance ou qu’ils ont été répétés car alors, nous sommes même incapable de comprendre ce qu’il se passe, d’en faire une narration qui a du sens comme Martine pouvait le faire avec l’accident de voiture.
Exemple : David est cadre dans une entreprise. Récemment son N+1 l’a convoqué dans son bureau et s’est montré véhément et agressif avec lui vis-à-vis de son travail. David s’est trouvé totalement impuissant pour répondre, et s’est senti comme paralysé. Lui qui se dit habituellement peu émotif s’est trouvé au bord des larmes et depuis, il ne dort plus et est terrifié à l’idée d’avoir à nouveau à faire à son manager. Le travail en séance amène David à parler de son enfance durant laquelle son père le battait régulièrement pour passer ses nerfs ou lorsqu’il avait une mauvaise note. Il sait que c’est arrivé, mais il dit ne pas se rappeler de grand chose.
Ici, on le voit, la situation présente des similitudes avec l’enfance de David : une personne, supérieure symboliquement comme l’était son père, hausse le ton avec lui et manifeste de l’agressivité. Cela réactive le souvenir non traité des violences vécues dans son enfance et lui fait craindre pour son intégrité physique comme s’il allait à nouveau être victime de violence. Pourtant David sait bien que son manager ne va pas le frapper. Mais son corps réagit malgré tout.
Souvenirs intégrés et non traités
C’est l’une des caractéristiques d’un souvenir non traité par notre système de guérison : on sait quelque chose rationnellement, mais émotionnellement, on ne peut s’empêcher de réagir.
L’autre caractéristique principale d’un souvenir non traité, c’est son mode d’accès : là où un souvenir traité, qui appartient à notre histoire, peut être évoqué sans le revivre, un souvenir non traité est revécu lorsqu’on s’en souvient. C’est d’ailleurs en partie pour ça qu’on ne peut pas le traiter : il est toujours présent, réactivé à chaque fois.
Pour faire un parallèle, imaginez un livre d’aventure : un souvenir intégré, c’est comme ouvrir ce livre et voir les mots sur la page, on comprend ce qu’il se passe, on peut même ressentir des émotions, mais on sait aussi qu’on est en train de lire un livre. Un souvenir non traité, c’est comme ouvrir ce livre et se retrouver plongé à l’intérieur, au milieu de l’histoire du livre.
La thérapie EMDR
L’hypothèse de l’EMDR est que derrière de nombreuses souffrances psychologiques, il y a une activation dans le présent de souvenirs du passé non traités. Des fois c’est très évident, dans le cas des gros traumatismes comme les agressions, les accidents graves, ou des attentats. D’autres fois, c’est plus subtil comme dans des situations de négligence, de violence psychologique, ou avec des souvenirs très anciens. On pense en EMDR qu’il s’agit de fait de retraiter ces souvenirs pour les aider à intégrer notre histoire. On ne va pas oublier, mais on va réduire l’activation émotionnelle à la remémoration des souvenirs ainsi qu’ en présence des déclencheurs de la problématique actuelle. Ainsi par exemple pour le cas de David plus haut, il pourrait voir son supérieur tout en restant connecté à sa partie adulte qui sait qu’il ne va rien lui arriver et il pourra poser une limite à l’agressivité à laquelle il fait fasse.
A quoi ressemble une séance de retraitement en EMDR ?
L’EMDR consiste, dans les faits, à activer le souvenir non traité tout en stimulant votre système de guérison. On dit qu’on retraite un souvenir. Pour stimuler votre système de guérison, on utilise principalement, la Stimulation Bilatérale Alternée, c’est à dire que l’on active alternativement la partie droite et la partie gauche de votre cerveau. Soit en faisant bouger vos yeux de gauche à droite, soit au travers d’autres moyens si on en a besoin. Ce faisant, on permet au souvenir de se connecter à tous nos autres souvenirs et nos connaissances sur nous-même et le monde et d’intégrer ce qu’on appelle nos réseaux adaptatifs.
Pourquoi ça marche ?
Et bien on ne le sait pas encore exactement, ou plutôt, plusieurs hypothèses existent. On pense notamment que nous répliquons “à la main” ce que notre cerveau fait normalement automatiquement pendant notre sommeil. En effet, lorsque l’on rêve, nos yeux bougent très vite de gauche à droite et on pense que c’est le signe d’une activation de notre système de guérison. On pense également que ces stimulations permettent de mettre un pied dans le passé tout en gardant un pied dans le présent et ainsi de ne pas être absorbés par notre souvenir, ce qui contribue à l’atténuation des émotions. Il y a sans doute du vrai dans plusieurs de ces explications.
Ce que l’on sait en revanche, c’est que cela marche. Mais les Stimulations Bilatérales Alternées ne sont pas les seules techniques responsables de l’efficacité de l’EMDR et votre thérapeute vous accompagnera tout au long du travail avec d’autres stratégies sur le chemin de la guérison, de l’intégration de vos souvenirs difficiles et du développement de vos ressources.
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